Le refrain
Peut être que tous les musiciens passons par là, tous les écrivains, tous les peintres, tous les misfits, selon l’ordre établi, l’ordre des choses. Quand tu attaques la B, le coeur, la deuxième partie, il’ y a la solitude, bien sûr, et la certitude que tu viens de quelque chose de bien. Il y a le plaisir, tous les plaisirs ensemble, et tu flanches, probablement. Y’a la peur aussi.
Et puis il y a le quatrième degré, tu sais que ça marche toujours. Tu pars sur l’accord du quatrième degré de la gamme, qui va sûrement t’inspirer une ou deux idées de mélodie, filtrées par l’émotion, le texte, la mélodie du couplet qui termine. Tu sais que la chanson ne finira peut être pas comme ça, mais tu t’abandonne, puisque c’est simple, c’est naturel, c’est logique, tu t’abandonnes.
Tu étais donc en tonalité La Majeur, tu passes au Ré majeur. Puisque dans le couplet tu avais finalement décidé d’alterner les accords majeurs avec majeurs 7ème (A – A7 – F# – F#7 – D -D maj7 – E – E7). Tu continue sur cette idée, et tu pars sur le D maj7.
En fait, je n’ai pas le reflexe d’analyser la séquence d’accords au moment de composer: à partir du quatrième degré, c’est la mélodie qui conduit, là je cherche les accords qui harmonisent la mélodie. Finalement, dans le diatonique, ça tourne évidement toujours autour de I-IV-V.
La simplicité, c’est souvent la meilleure decision. Cependant, avec le temps, les variations viendront: les substitutions, les accords qui te font vibrer, il faut juste essayer, puis essayer encore.
Finalement, ça termine en: Dmaj 7 – Dº7 – F#m – B7 – Bm7 – E – A – C# . En fait deux sequences de 4 accords qui évoquent une question et une réponse: le F#m et B7 sont comme le point d’interrogation, le A final est l’affirmation, le retour sur l’accord tonique. le C# joue le rôle du 5e degré, l’accord de dominante, qui permet de répeter la séquence, mais aussi de retomber facilement sur l’intro.
Quand tu ataques la B, tu mise tout. Tu oublies tout. Tu renonces à tout. Tu y mets même la vie. Sur la balance. Y’a plus d’enfants, plus de famille, plus d’histoire, pour un instant. Ou bien ils sont tous là. (En fait, y’a souvent un catalyseur qui précipite les choses, qui installe une angoisse qui nettoie tout).
Et tu y vas, tu écris.
- Putain Papa! J’ai pris une chataigne!
- Quoi?!
- Je conduisais vers Croydon, à mi-chemin, en pleine tempête…
- Oui, et alors?!
- Alors la voiture a bondit! Comme si c’etait la fin du monde, une microseconde, j’ai pensé que je perdais le contrôle, l’adrénaline, j’ai jamais creuvé un pneu! La voiture a bougé, j’ai tenu, et puis j’ai pu stopper, à gauche…
- Et donc?! Pneu crevé?!
- Non, attends! Une camionette s’arrête à côté, pleine de gens qui gesticulent, j’ouvre la fenêtre et j’entends: “don’t! don’t!!!”
- Bref je flippe, et il me disent: “ you were just hit by a lightning bolt! Don’t get down!!”
Alors là oui je flippe! Je ferme la fenêtre, je respire profondément, je me souviens de ma soeur, et de Canela, je respire encore, et je redémarre. Et puis encore, et encore, la voiture saute! Et encore! Bref, je suis sur une station de service, y’a des éclairs partout, qu’est que tu en penses?
- …
♫
You,
Broke me bad,
You never seem to care.
And I,
Had to carry,
This Love
♫
Quand tu trouves la B, tout se précipite, tu veux finir la chanson à tout prix: chanter, copier-coller, écrire le deuxième couplet, qui n’existe peut être pas encore. Rechanter, éditer, mixer, etc… Tout ca bien sûr, arrive au meilleur moment.
Parfois tu tournes en courant
De la cuisine vers le salon
Tu sais plus s’il faut écrire,
Baisser le feu,
Pisser.
Donc tu cours vers les chiottes,
Down the hall.
Mettre les écouteurs
Ouf, voir le feu…
T’as accroché les habits?
T’as lavé?
T’as mis play sur la machine?
Ouais, une taffe et je pense clever…
Ca sent le brûlé
Ah ouaiiis,
Les champignons à l’ail! Merde…
Ok, cut, mettre play sur la machine,
Je m’assieds
Musique